J'aurais été
poète ou écrivain, j'aurais certainement brodé sur
mon village. Il y a tant à dire sur
Laroquebrou qu'un livre ne suffirait pas à contenir toute son histoire.
Ma ville est nichée dans la verdure et ses
monts servent de remparts aux vents autant qu'ils aient pu servir à stopper les
invasions des vandales d'antan.
Les vestiges du château sont d'ailleurs la preuve qu'au Moyen-Âge ses ennemis convoitaient sa situation, sa
beauté et peut-être aussi la cupidité de quelques seigneurs à s'approprier des terres.
Le château fut, jusqu'à la Révolution, la propriété des seigneurs de Montal. C'était une demeure colossale avec
ses six tours et son donjon. On dit même qu'un souterrain secret passait sous la rivière et reliait le
château à un autre domaine.
Le marquis d'Escart, qui avait épousé une fille de Montal, était une personne joviale qui aimait bien les
escapades pour festoyer avec ses sujets.
Je raconterais ici une
anecdote qui a fait mémoire : par une nuit de grande froidure le marquis, de l'esplanade du château, contemplait la rivière. Son miroir figé renvoyait au ciel des myriades de diamants. L'idée lui vint d'organiser
un bal au clair de lune sur la rivière gelée. Aussitôt, il convia
cabrettaïres et veilleurs, nobles et manants réunis ouvrirent le bal. Ils dansèrent, burent leurs pintes jusqu'au petit matin. On dit que jamais
salle de bal ne fut aussi glissante. Les mauvaises langues prétendent que notre joyeux seigneur s'éprit cette nuit-là d'une belle danseuse et qu'ils disparurent un moment dans la nature.
Mon village est beau et pour résumer cette beauté voici quelques couplets que j'ai confectionnés lors de mes promenades.
Maintes fois assise au détour d'un chemin,
Je t'ai contemplée dans la fraicheur du matin.
Seule dans les brumes j'attendais ton réveil,
Toi, silencieuse tu t'alanguissais de sommeil.
Soudain ainsi qu'une femme qui se dévoile,
Un clocheton, des cheminées émergent de tes voiles.
Lentement ton corps découvre sa nudité,
Des toits aux tuiles roses humides de rosée,
Enfin de cet océan de nuées apparaît la cité.
Sur la Cère le brouillard s'étire en un ruban
Puis il se déchire et le soleil baigne le courant.
Cette rivière connut son apogée au temps où le village était un important centre commercial. Bien avant le pont (XIIIème siècle), les transports des marchandises et les passages de voyageurs se faisaient en barques d'où le nom que donnèrent les Roquais à leur village : O Lo Roc Como O Venise.
À Laroquebrou comme à Venise, l'économie était basée sur les cuirs, la poterie et les foires à bestiaux.
Au fil du temps, et le progrès aidant, nos commerces se sont éteints. Peut-être à cause de cela, Laroquebrou, ancienne cité médiévale, est-elle devenue cité touristique ?